Les Étrusques, un peuple «sérieusement gai » : quand Anatole France pressentait les différences régionales de leur art

par Angelo Mazzei

Dans Le Lys rouge, publié en 1894, Anatole France glisse, presque incidemment, une remarque qui résonne aujourd’hui comme une intuition archéologique. Madame Marmet, personnage d’une élégance effacée, s’arrête « devant une vitrine pleine de petites figures d’hommes de bronze, grotesques, très gras ou très maigres ». France poursuit : « Les Étrusques étaient un peuple sérieusement gai. Ils faisaient des caricatures d’airain. »Cette phrase, à la fois légère et pénétrante, dit beaucoup plus qu’elle ne semble dire. Elle saisit ce double visage de la culture étrusque : la gravité du sacré et la jubilation du vivant. La caricature, chez eux, n’est pas moquerie : c’est conscience du corps et du temps. Ce rire de bronze, où la chair est tantôt lourde, tantôt famélique, traduit la lucidité d’un peuple qui regardait la mort avec familiarité. Mais Anatole France touche, sans le savoir, à une vérité que l’archéologie contemporaine ne cesse de confirmer. Il n’existe pas une « art étrusque », mais des arts étrusques. L’expression même devrait être plurielle. Les bronzes « grotesques » de Volterra ne ressemblent pas aux sarcophages sereins de Cerveteri, ni aux cippes austères de Chiusi. Chaque cité – Volterra, Clusium, Caere, Vulci – possédait son style propre, son accent visuel, sa manière de dire la vie et la mort. En parlant d’un peuple « sérieusement gai », Anatole France saisit peut-être cette diversité intime : un humour grave qui se déploie différemment selon les collines et les pierres, une mosaïque de sensibilités réunies seulement par un même regard sur le destin. Le mot « admiration douloureuse » par lequel il conclut la scène résume notre propre rapport aux Étrusques. Nous les contemplons avec le même mélange de fascination et de tristesse : fascination pour cette humanité qui riait devant la finitude, tristesse devant ce monde perdu, éclaté en douze peuples fédérés et pourtant unis par un génie commun. Ce que France entrevoyait dans la vitrine du musée n’était pas seulement une suite de figurines : c’était le rire du passé, immobilisé dans le métal, et la promesse que chaque cité, chaque atelier, chaque main d’artiste étrusque parlait une langue différente du même silence.


Gli Etruschi, un popolo «seriamente allegro».  Quando Anatole France intuì le differenze regionali del loro arte

Nel Lys rouge del 1894, Anatole France inserisce quasi di sfuggita una riflessione che oggi suona come un’illuminazione archeologica. Madame Marmet, personaggio di elegante malinconia, si ferma “davanti a una vetrina piena di piccole figure d’uomini di bronzo, grottesche, molto grasse o molto magre”. E France commenta: “Gli Etruschi erano un popolo seriamente allegro. Facevano caricature di bronzo”.

In questa frase, leggera e profonda insieme, si rivela tutto il doppio volto della civiltà etrusca: la gravità del sacro e la gioia del vivente. La caricatura, per loro, non era scherno ma consapevolezza del corpo, del tempo e della morte. Quel riso di bronzo – ora opulento, ora scheletrico – è un riso che nasce dalla conoscenza, dalla familiarità con la caducità.

Ma Anatole France, senza saperlo, tocca una verità che l’archeologia moderna conferma: non esiste un’“arte etrusca”, bensì arti etrusche. Il termine dovrebbe essere plurale. I bronzetti “grotteschi” di Volterra non hanno nulla dell’eleganza distesa dei sarcofagi di Cerveteri, né della severità astratta dei cippi di Chiusi. Ogni città – Volterra, Clusium, Caere, Vulci – possedeva un proprio linguaggio formale, una sensibilità autonoma, una diversa maniera di dire la vita e la morte.

Definendo gli Etruschi un popolo “seriamente allegro”, Anatole France ne colse forse l’essenza comune: una letizia grave, un umorismo metafisico che si declina diversamente sulle colline e nei sepolcri della loro terra.

E l’“ammirazione dolorosa” con cui Madame Marmet guarda quelle figure è, in fondo, anche la nostra. Davanti a quelle opere, proviamo la stessa nostalgia: per un’umanità che sapeva ridere davanti alla morte, e per un mondo perduto, diviso in dodici popoli e unito da un solo, inconfondibile spirito.

Ciò che France vide dietro la vetrina del museo non era solo una serie di statuette, ma il riso del passato imprigionato nel metallo: il linguaggio muto e plurale di una civiltà che, ancora oggi, ci parla con la sua gioia grave.


Passage de Anatole France cité dans l’article:

https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Anatole_France_-_Le_Lys_rouge.djvu/176

Lascia un commento